Témoignage d’Emmanuelle Duclos
Eclats de confinement….
Il est 12 heures ce mardi 17 mars. Un immense silence surgit de notre ville ; silence étonnant, silence bienfaisant, silence angoissant comme celui de la vie qui se fige.
C’est le confinement !
Une parole me vient alors à l’esprit, d’un certain Quohélet, du livre de l’ecclésiaste dans le 1er Testament. « Il y a un moment pour tout et un temps pour toute chose sous le ciel » (Ecclésiaste 3, 1)
Etre confiné ! Et si c’était le temps de « prendre le temps » justement…
Le temps du repos…, quand « frère âne » récrimine… « Tu vas trop vite….tu me malmènes ! » Alors puisque du temps est donné au temps, pourquoi ne pas en donner à « frère âne ». « Pas plus vite que la machine » me disait un médecin très finaud ! Temps de la lecture, de la promenade (hygiénique certes en 1 heure montre en main !), de la contemplation d’une œuvre d’art etc…
Le temps de la rencontre avec notre Dieu, dans une intimité qui peut se prolonger, de la rumination de la Parole de Dieu toujours offerte comme une nourriture vitale ; le temps d’accueillir la parole du pape François dans sa messe de semaine à la maison Saint Marthe : parole d’une limpide simplicité, toujours percutante, toujours actualisée dans notre quotidien. Pas d’idéologie, pas de leçon de morale, mais chaque jour cette question : que fait Jésus, que nous dit-il, que nous dit cette parole ? Par exemple celle du mardi 12 mai : qu’est-ce que la paix que Jésus nous donne : « la paix du monde nous replie sur nous et nous anesthésie ; la paix que Jésus donne est féconde, joyeuse et nous met en mouvement pour rejoindre nos frères ». Nous ne pouvons pas te recevoir dans ton eucharistie, Seigneur, mais tu sais nous rejoindre par bien d’autres chemins et parler à notre cœur.
Le temps de l’intercession pour le monde en souffrance, pour tous ceux pour qui ce confinement est une épreuve et crée de l’insécurité ; le temps de l’intercession confiante pour ceux que nous aurions aimé visiter, pour ceux dont nous sentons que ce temps était lourd ; réentendre cette Parole du Seigneur à Moïse : « J’ai vu, j’ai vu la misère de mon peuple… j’ai entendu son cri devant ses oppresseurs » ! (Exode 3, 7)
Le temps de la vie fraternelle autrement… le temps des appels téléphoniques reçus et donnés, des apéros via Internet avec les enfants, des courriels qui offraient de si beaux témoignages, de la prière paroissiale partagée le dimanche soir à 18 heures : un moment de joie d’entendre les voix amies, de partager nos intentions personnelles, et nous faire désirer l’heure de se retrouver en chair et en os…
Le temps de la solidarité avec les voisins tous les soirs à 20 h : applaudissements, musique, plaisir de se rencontrer, de se rendre service en particulier avec ceux que l’on voyait le moins. Joie pour quelques-uns de sortir les bougies allumées le soir de Pâques …
Lundi 11 mai, temps du déconfinement… « Il y a un temps pour toute chose »…
Le silence peu à peu se charge à nouveau des bruits familiers de la ville. Rien n’est fini cependant, cette « petite bestiole invisible» sévit encore. Et pourtant, si le temps du neuf, de l’autrement, du mieux…était venu !
Ta parole Seigneur nous invite à espérer un monde meilleur : cf. « Je suis descendu….pour vous délivrer et vous faire monter de cette terre vers une terre plantureuse et vaste » (Exode 3, 7).
« Nous croyons, Seigneur, en des chemins nouveaux pour notre humanité, pour notre terre. La pandémie et le confinement ont suscité interrogations et remises en cause. Rends-nous attentifs aux signes de ton Esprit Saint ; que nous sachions accueillir tes voies pour un monde plus juste, plus fraternel, plus respectueux de la création. Donne-nous l’élan pour poser des pas nouveaux, même des « petits pas » comme nous y invite la pape François dans Laudato Si (§ 230) ».
Emmanuelle Duclos, le 22 05 2020