3ème Dimanche de Pâques
« Je voyais le Seigneur devant moi sans relâche : il est à ma droite, je suis inébranlable. » (Ps 15, 8 ; Ac 2, 25)
Chers amis,
Que la paix soit du Christ Sauveur soit toujours avec vous ! J’espère que vous vous portez bien tous jusque-là.
Dans les anciens temples grecs, on voit souvent de magnifiques statues de femmes, que l’on nomme « cariatides ». Leurs têtes, relevées bien haut, supportent le toit du sanctuaire. Une charge énorme pèse sur elles et cependant leur front, leurs yeux, toute leur attitude parlent d’autre chose. Une sorte de fierté confiante en elles-mêmes les anime, comme si elles ne sentaient rien de la charge écrasante qui pèse sur elles en portant tout un temple sur leurs têtes. C’est ainsi que les « bras musclés » et les « âmes robustes » des ceux qui rencontrent le Christ dans le chemin difficile de vie peuvent supporter les épreuves même écrasantes et parviennent ainsi à la victoire.
J’ai envie de dire que le Christ est l’invisible Promeneur divin qui continue d’accompagner notre histoire, chacun de nous, en toute discrétion. Grâce à lui qui est toujours à notre côté, nous sommes inébranlables !
C’est la situation des deux disciples surpris par ce Maître d’encouragement et d’espérance sur le chemin d’Emmaüs, chemin de désespoir. Déçu et tout triste, ils fuyaient ce qu’ils avaient perçu, dans leur pensée humaine, comme un échec : « Nous espérions que c’était lui qui allait délivrer Israël. Mais avec tout cela, voici déjà le troisième jour qui passe depuis que c’est arrivé ». Expression de déception ! Telle que nous exprimons bien souvent, lorsque, dans une époque où l’on veut « tout et tout de suite », nous n’arrivons pas à nous emparer des choses et des événements, comme nous le voulons. Sans doute, cela nous remplit de sentiments d’échec, de vide et de tristesse. La satisfaction ne se trouve que dans un vrai abandon et la confiance, qui se construisent dans une vraie rencontre avec Celui qui vient nous rejoindre discrètement sur les complexes chemins de l’histoire.
Cette notion d’échec était encore plus compliquée et semblait se renforcer par les nouvelles apparemment navrantes de ceux qui étaient partis voir le tombeau du Maître. Rien n’est aussi découragent. N’ont-ils pas commencé à perdre patience lorsque les nouvelles non rassurantes venaient de tous les sens, en plus de leur confinement dans la peur ? Évidemment, il n’y avait plus rien à croire, sinon de croire en leurs propres sentiments de catastrophe et de désespoir. Que faisons-nous avec toutes les mauvaises nouvelles et informations qui nous tombent dessus tous les jours et de tous les coins des médias ? Se décourager ? Se révolter ? Loin de cela ! Comme il est difficile de percevoir une nouvelle forme de vie qui peut s’affirmer même dans l’épreuve ! Car souvent, l’homme ne voit que l’apparence, le cocon de la véritable réalité, celle du papillon qui est né en son sein et qui, le lendemain, s’envolera, et librement. Le prophète l’a bien remarqué : « Autant le ciel est élevé au-dessus de la terre, autant mes chemins sont élevés au-dessus de vos chemins, et mes pensées, au-dessus de vos pensées » (Is 55,9). Et les pensées divines sont celles qui, quoi qu’il arrive, ramènent nos cœurs lourds de tristesse à la joie, par la rencontre qui nous ouvre les yeux.
Chrétiens que nous sommes, appelés à une espérance impérissable, mais toujours dans la chair humaine ! Il nous arrive souvent d’être épuisés par la tristesse, le désespoir. Le moral peut nous faire défaut à des moments de la vie, tellement que nous commencions à douter l’authenticité même de notre foi ou à être lent à croire. On y perd souvent la conscience de la présence discrète du Ressuscité qui vient nous ouvrir les yeux au vrai sens des épreuves. Mais il ne suffit pas qu’il se présente à nous. Encore faut-il lui exprimer notre souhait : « Reste avec nous Seigneur ». Il peut faire semblant d’avoir un autre projet plus important. Ce qu’il attend en réalité, c’est cette « demande explicite », bien vraie et faite en toute liberté, sincérité et la confiance d’une âme amoureuse de la Sagesse et de la Puissance de Dieu (cf. 1 Co 1,24). Cette prière est importante pour chaque rencontre.
Oser prendre la parole de Dieu et l’ouvrir, pour que nos cœurs froids de tristesse puissent déjà commencer à bruler de la chaleur de cet accompagnant invisible qui réchauffe nos cœurs tous les jours. Lire la parole de Dieu, la méditer au quotidien, voilà un antidote inédit de l’angoisse et de la tristesse ! Cela était si évident et indépassable pour saint Augustin que lorsque, à cause de cette parole brulante de vie, il s’est bien tiré du monde de mensonge qui divisait son esprit et lui arrachait la paix intérieure, il n’avait plus de choix sinon de s’écrier : « Bien tard je t’ai aimée, ô beauté si ancienne et si nouvelle, bien tard je t’ai aimée ! » Dans cette page des Confessions, l’une des plus célèbres, Augustin renvoie à son expérience de Dieu au jardin de Milan, un Dieu présent au cœur de l’homme, certes. Mais une présence que nous sommes souvent empêchés de voir ou sentir à cause des tristesses, des angoisses et des multiples occupations de ce monde :
« Bien tard je t’ai aimée, ô beauté si ancienne et si nouvelle, bien tard je t’ai aimée ! Et voici que tu étais au-dedans, et moi au-dehors et c’est là que je te cherchais, et sur la grâce de ces choses que tu as faites, pauvre disgracié, je me ruais ! Tu étais avec moi et je n’étais pas avec toi ; elles me retenaient loin de toi, ces choses qui pourtant, si elles n’existaient pas en toi, n’existeraient pas ! »
« Tu as appelé, tu as crié et tu as brisé ma surdité ; tu as brillé, tu as resplendi et tu as dissipé ma cécité ; tu as embaumé, j’ai respiré et haletant j’aspire à toi ; j’ai goûté, et j’ai faim et j’ai soif ; tu m’as touché et je me suis enflammé pour ta paix. »
« Quand j’aurai adhéré à toi de tout moi-même, nulle part il n’y aura pour moi douleur et labeur, et vivante sera ma vie toute pleine de toi. Mais maintenant, puisque tu allèges celui que tu remplis, n’étant pas rempli de toi je suis un poids pour moi. Il y a lutte entre mes joies dignes de larmes et les tristesses dignes de joie ; et de quel côté se tient la victoire, je ne sais. Il y a lutte entre mes tristesses mauvaises et les bonnes joies ; et de quel côté se tient la victoire, je ne sais. »
« Ah ! malheureux ! Seigneur, aie pitié de moi. Ah ! malheureux ! voici mes blessures, je ne les cache pas : tu es médecin, je suis malade ; tu es miséricorde, je suis misère. N’est-elle pas une épreuve, la vie humaine sur la terre ?Et mon espérance est tout entière uniquement dans la grandeur immense de ta miséricorde. Donne ce que tu commandes et commande ce que tu veux. Ô amour qui toujours brûles et jamais ne t’éteins, ô charité, mon Dieu, embrase-moi ! » (Confessions, X, 27, 38-29, 40)
Que le Christ, l’invisible présence divine dans vos cœurs, vous garde toujours dans la confiance et l’abandon, et vous conduise à la joie de celles et ceux qui rencontrent vraiment le Ressuscité sur le chemin de la vie.
Bon dimanche !
Dominic +
NB :
- La célébration des messes continue comme c’est habituellement le cas avant la semaine sainte.
- Tous les jours, à 15h (sauf le dimanche à 11h, avec Roland-Paul), messe célébrée par Dominic pour les paroissiens.
- Tous les jours, à 19h, messe célébrée par Jean-Claude (sauf le dimanche à 11h).
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- Sachons transformer ce temps de confinement, de Pâques à la Pentecôte, « en un temps avec Dieu », comme nous incite notre Archevêque en nous donnant 4 points de repères : la prière, l’Écriture Sainte, les gestes de miséricorde, le désir de l’Eucharistie.